La rue vieillit. À preuve, le Pas de la rue, le seul organisme à s’occuper exclusivement des personnes âgées de 55 ans et plus, a vu sa fréquentation bondir de 39% en un an et s’est vu obligé à ouvrir les dimanches. L’organisme a aussi construit huit logements de transition pour sa clientèle, des appartements meublés où les personnes peuvent demeurer pendant deux ans, le temps de se replacer. Il a aussi adapté son horaire selon les heures d’ouverture des refuges. L’organisme a travaillé conjointement avec les organismes du quartier (Groupe Information Travail, En marge 12-17, Le Cube, Les Chemins du Soleil) afin de transformer une église en un lieu communautaire, le Centre culturel et communautaire Sainte-Brigide. Un consortium qui permet des partenariats, selon le directeur général du Pas de la rue, Robert Beaudry.
«Le Pas de la rue se veut un lieu d’accueil, d’échange, un endroit pour se poser, mais aussi un tremplin pour rebondir, dit Robert Beaudry. On les accompagne dans un processus.» Au moment où je suis allée visiter, par un beau jeudi d’automne, on soulignait les anniversaires du mois. La salle commune était pleine à craquer, la bonne humeur était contagieuse. C’est que tout le monde se connaît, là: les nouvelles personnes doivent d’abord passer par un processus d’accueil, démontrer qu’ils vivent une problématique de pauvreté ou d’isolement. Ils rencontrent une intervenante, puis il y a un comité de sélection. Après coup, les personnes peuvent fréquenter le centre de jour et participer aux activités extra organisation: sorties, activités organisées par des partenaires comme Execo, etc. Une infirmière est aussi présente deux fois par mois pour offrir une oreille adaptée à une population vieillissante. L’organisme voit 500 personnes par an, dont 60 par jour. Les problématiques les plus souvent rencontrées chez les personnes accompagnées (c’est ainsi qu’on nomme la clientèle ici) sont l’alcoolisme et le jeu. Autrement, on voit dans la clientèle beaucoup de personnes qui viennent de la Maison du Père, du quartier limitrophes, des résidences pour aînés, des HLM, de la rue et de l’Accueil Bonneau.
«La volonté de se réinsérer chez les personnes plus âgée est plus forte, explique Robert Beaudry. Ils en ont vu. Ils veulent s’en sortir. Ils se retrouvent dans une craque, il y a peu de choses pour eux. On veut montrer que c’est possible de se réinsérer à 55 ans.» Ici, le logement est un outil d’intervention: les personnes ne signent pas de bail, mais une entente de séjour dans laquelle ils s’engagent à rencontrer l’intervenante et à établir des objectifs avec elle. Sur les huit personnes entrées dans le programme, deux se sont trouvé un logement hors de l’organisme. Le programme réapprend aux personnes à habiter en logement.
L’organisme est bien implanté dans son milieu avec sa communauté, et prochainement il s’implantera dans Mercier-Est, un milieu qui connaît une grande précarité, avec l’achat d’une église qui sera convertie en 40 logements permanents avec accès direct au centre de jour.
«On n’arrête pas de dire que le vieillissement est une fatalité, s’exclame Robert Beaudry, mais c’est une opportunité! On peut offrir des services qui permettent à ces gens d’être des acteurs dans la communauté.»